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PSYCHANALYSE N° 8

Phallus et fonction phallique

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janvier 2007

THÉORIE

Les mots et la chose. Isabelle Morin

« Les mots et la Chose » s’ouvre sur une interrogation dialectique dont les termes sont deux versions possibles de l’humanisation : qu’est-ce qui est premier, des mots ou de la Chose, du réel ou du symbolique ? La réponse d’I. Morin est condensée dans sa déclinaison du célèbre énoncé freudien (« Wo es war, soll ich werden ») sous la forme « Là où était la Chose, tu peux savoir », à condition de donner un certain statut à ce savoir, qu’elle déplie au fil d’un développement reprenant pas à pas l’abord, toujours difficilement saisissable, de la Chose freudienne.

« Là où c’était (la Chose), Scilicet ?Il y a deux versions possibles de l’humanisation. Elles ne sont pas exclusives mais elles méritent sans doute d’être dialectisées. La première dirait qu’au commencement était la Chose, puis vinrent les mots. La seconde considérerait que tout a commencé avec les mots qui ont fait exister la Chose. Ces deux versions répondent à deux élaborations différentes de la constitution du sujet. Une qui fait prévaloir l’objet « […]  [Extrait de l’article]

L’évidement du savoir et le style de l’inconscient. Luz Zapata-Reinert 

« L’évidement du savoir et le style de l’inconscient » aborde cette question fondamentale, depuis Freud : « Comment s’enseigne la psychanalyse ? » – qui semble paradoxale si l’on considère que la psychanalyse produit, de structure, une opération de soustraction dans le savoir. A partir de cette opération d’évidement, par laquelle naît un sujet, L.Zapata Reinert nous introduit à ce qu’articule Lacan de l’acte et du style de l’analyste.

« Comment s’enseigne la psychanalyse aujourd’hui ? Répondre à cette question suppose d’affronter au moins deux paradoxes que je vais essayer de présenter en les mettant en perspective avec mon propre parcours dans la psychanalyse et dans l’enseignement ». [Extrait de l’article]

L’Oblativité : premières controverses. Christine Ragoucy

Dans « L’Oblativité », C.Ragoucy dégage les grands axes des controverses dont ce concept a fait l’objet, depuis son invention en 1926, en France, puis montre que la critique qu’en fait Lacan (en 1938) a une portée qui dépasse l’argument historique, en ce qu’elle annonce son retour à Freud et sa théorie langagière de l’inconscient.

« Généralement, quand on mentionne les critiques de Lacan sur l’oblativité, on fait référence aux débats de Lacan et de la génération de l’après-guerre des psychanalystes de la Société Psychanalytique de Paris, autour de la question de la relation d’objet. Les coordonnées en sont posées en 1958 dans “La direction de la cure” quand Lacan établit de façon définitive le statut de cette notion dans la psychanalyse : l’oblativité est une des modalités de la relation d’objet, celle mise en jeu dans le fantasme de l’obsessionnel pour escamoter son désir. Les dernières références importantes à l’oblativité chez Lacan datent de 1964. »[Extrait de l’article] 

Du Signe… à la Lettre vivante. Yamina Guelouet 

« Du Signe…à la Lettre vivante » est une conception du trajet qui s’opère du début à la fin d’une analyse, trajet qui reviendrait, dit Y. Gelouet, à celui qu’a accompli le sujet dans les conditions initiales où son désir a émergé : quand l’enfant adresse un appel au père, et qu’il reçoit de lui le Signe du nom propre, parole d’amour, qui lui ouvre la voie au désir via la castration de la mère. Le Signe, au terme de ce trajet, est transmuté dans l’inconscient en Lettre vivante (Y. Gelouet précisant, d’après Freud, en quoi consiste cette lettre) qui est aussi ce qui s’incarne au terme d’une analyse.

« Le titre évoque un trajet entre deux moments, celui où un Signe apparaît, et l’autre où il s’écrit. C’est un Signe porteur d’amour, qui traverse une cure, non sans remous, et accompagne l’être parlant, qui comme corps vivant sexué se trouve pris dans des impasses que le langage, de structure, lui impose. L’être parlant, en toute ignorance, orienté par un réel, celui de la jouissance de l’être, poursuit un dessein, celui de l’atteindre pour réaliser le rapport sexuel. C’est le syntagme que Lacan introduit pour désigner la jouissance absolue que vise cet être ».[Extrait de l’article] 

LA STRUCTURE

Phallus et fonction phallique. Pierre Bruno

« Phallus et fonction phallique » inaugure les synthèses de grands concepts théoriques, proposées par PSYCHANALYSE. Ce n°8 en présente la première partie, situant les temps forts de l’élaboration freudienne, du « fait-pipi » du petit Hans au « primat du phallus », sur lequel Freud n’a jamais cédé. Au-delà des repères connus, sont mis au jour de « vrais diamants », issus de textes inattendus, qui préfigurent le statut du phallus chez Lacan et sa conception de la sexuation, que P.Bruno condense ainsi : « l’échec du langage, c’est le destin».

« La revue PSYCHANALYSE n’est pas une revue à thème, mais elle est articulée en parties. Nous avons décidé d’introduire, sous la dénomination “La structure”, une nouvelle partie. Il s’agit de proposer, à chaque numéro, l’inventaire d’une catégorie (je ne dis pas concept pour tenir compte de la critique du concept dans le dernier enseignement de Lacan). Les catégories sont les différents items ayant trait à l’état civil de l’étant. Sur la carte d’identité de l’étant, Aristote a imprimé dix rubriques : substance (ousia), quantité, lieu, etc. Dans les catégories de Freud et de Lacan, il n’est pas impropre de substituer d’autres rubriques qui se rapportent au parlêtre et non à l’étant en général : phallus, symptôme, Nom-du-Père, Autre, etc. Nous avons choisi de commencer par le phallus, et la fonction phallique. Nous vous invitons donc à la visite du chantier, que nous sommes quatre à mettre en train : Fabienne Guillen, Dimitris Sakellariou, Marie-Jean Sauret et moi-même.

Sans originalité, nous avons distingué : 1) Freud, 2) après Freud et avant Lacan, 3) Lacan, 4) après Lacan. Dans ce numéro, nous traiterons les parties 1 et 2, mais d’ores et déjà seront indiqués les points que nous avons cru pouvoir retenir concernant les parties 3 et 4. Dans le prochain numéro, nous développerons ces parties, sachant que ce développement aura des effets rétroactifs d’ajustement sur ce qui est présenté dans ces deux premières parties, avant la carte finale. Enfin il s’agit d’un savoir, et le style dans lequel celui-ci est exposé ne saurait être indifférent. Nous avons tenu compte de quatre considérations : le savoir est à prendre, non à apprendre ; la psychanalyse est, en tant qu’expérience, intransmissible ; l’exigence d’un savoir lisible et questionnable fait partie de l’éthique de la psychanalyse ; l’exigence d’un exposé symptomal, c’est-à-dire qui n’efface pas mais au contraire relève les points de butée, les évolutions, les ruptures, voire les contradictions, de ceux qui ont construit ce savoir. »[Extrait de l’article] 

La querelle du phallus. Fabienne Guillen 

LE CAS

« Saudade » ou la jeune homosexuelle. Thérèse Charrier

« Saudade ou la jeune homosexuelle» amène au célèbre cas de Freud de nouvelles clés de lecture, portées par la biographie de cette même Sidonie Csillag, parue en 2003. Partant du « C’est à cause de ma mère » qu’elle y énonce, T. Charrier articule différentes versions logiques du thème du « désistement », introduit par Freud.

« “Comment se fait-il que je sois devenue ainsi ? ” se demande Sidonie Csillag à la fin de sa vie.Le contact d’une main, un mouvement du corps avaient pu l’exciter bien plus que les zones du corps sur lesquelles tout le monde orientait impérieusement le plaisir. Comme elle trouvait horrible l’endroit sombre et la “chose” menaçante entre les jambes des hommes ! combien angoissante, bien qu’un peu mieux quand même, la plage humide chez les femmes ! combien repoussante une langue dans sa bouche ! Quand enfin ça finissait par réussir, avec ses amours, c’était déjà terminé. Comment se fait-il que je sois devenue ainsi ? C’est “à cause de ma mère… toutes les femmes étaient des ennemies pour elle… Et seule, cette beauté, celle de ma mère, la mienne et celle de beaucoup de femmes m’a émue et a déclenché en moi de très violents sentiments ; j’ai toujours été amoureuse de la beauté ; une belle femme est toujours une jouissance pour moi, il en sera ainsi jusqu’à la fin de ma vie.”[Extrait de l’article] 

L’âme. Patricia León -Lopez

Dans « L’âme », P. León-López ouvre une perspective, féminine en quelque sorte, dans la lecture du cas de Dora, en y déployant les différents termes du rapport qu’entretient la femme (hystérique) avec l’âme : la position de la « belle âme », la question sur « l’être femme », l’amour de l’âme que Lacan écrit « elle âme l’âme ».

« Pourquoi Dora ? Au début du dernier chapitre de la Psychopathologie de la vie quotidienne, Freud s’interroge sur ce qui a pu le déterminer a choisir le prénom de “Dora” pour la publication de ce “Fragment d’une analyse d’hystérie”. Ce prénom était le prénom familièrement donné à une gouvernante au service de sa sœur Rosa. La prétendue Dora s’appelait en réalité, elle aussi, Rosa et ne pouvait conserver le même prénom que la maîtresse de maison. D’où la substitution, que Freud apprit par hasard, un soir où il se trouvait chez sa sœur, et qu’il déplora. »[Extrait de l’article]

LA PASSE

Le souci du passant. Panos Papatheodorou

« Le souci du passant » et « Une frontière enfin possible » sont deux textes sur la passe : l’un est une élaboration de P. Papatheodorou sur ce qui est en jeu dans le temps logique où le passant choisit de faire la passe ; l’autre est un témoignage, où Mariane Lateule nous rend sensibles à la fois ce choix du moment, lié à des événements singuliers, et les effets de la passe, dont le « enfin possible » prend valeur universelle.

« Il s’agit de mon texte d’intervention tel qu’il a été prononcé au colloque “La passe de Lacan et l’expérience psychanalytique” tenu à Athènes le 3 juin 2006. Tout d’abord, je tiens à expliquer le titre de cette intervention. Le mot “souci” qui est de toute façon un signifiant, est une traduction de “μέλημα” dérivé du verbe “μέλει” qui, en grec ancien, est impersonnel et signifie s’occuper de quelqu’un ou de quelque chose, et plus précisément en prendre soin. Par conséquent, la question est de savoir quel est l’objet de cet acte. “Un signifiant représente, comme nous le savons, le sujet pour un autre signifiant.” Un signifiant, choisi parmi d’autres pour me représenter, va de pair avec d’autres signifiants. Je prends alors le signifiant souci de ce topos qui s’ouvre entre le sérieux et l’attente, tel qu’il a été posé par Kierkegaard et ensuite par Lacan dans son séminaire sur l’Angoisse ».[Extrait de l’article ] 

Une frontière enfin possible. Marianne Lateule

« Le souci du passant » et « Une frontière enfin possible » sont deux textes sur la passe : l’un est une élaboration de P. Papathéodorou sur ce qui est en jeu dans le temps logique où le passant choisit de faire la passe ; l’autre est un témoignage, où Mariane Lateule nous rend sensibles à la fois ce choix du moment, lié à des événements singuliers, et les effets de la passe, dont le « enfin possible » prend valeur universelle.

« Dans l’après coup de la crise institutionnelle à l’ECF et la création de l’APJL, la porte de la passe s’est ouverte ; restait à en franchir le seuil. L’offre de la passe n’était plus demandée, voire commandée par l’Autre, ce grand Autre qu’incarnait pour moi l’École. C’est au contraire, causé par un désir qui pouvait se passer d’une reconnaissance, que cette possibilité est advenue. Mais un pas de plus s’avérait nécessaire. Ce pas s’est présentée lors de deux évènements de séparation : une séparation réelle sous la forme d’un deuil, et une séparation symbolique touchant le couple mère-enfant. La sortie de la cure m’avait surprise en même temps qu’elle s’imposait. »[Extrait de l’article]

L’ESSAI

Nostalgie du Père « grandiose » dans L’utopie de Thomas Moore. Jean-Bernard Paturet

« Nostalgie du Père grandiose dans L’Utopie de Thomas More »  constitue un essai sur l’utopie, qui repose sur deux piliers : le premier, contre une conception de l’utopie comme retour au maternel, la définit comme nostalgie d’un père grandiose, protecteur et tout-puissant ; le deuxième présente ce père d’amour, (l’Utopus de Thomas more) comme la forme inversée du père de la horde (l’Urvater de Freud), ces deux faces d’une même figure ayant des conséquences qui conduisent J.B. Paturet à une réflexion sur la fin de l’histoire.

« Réfléchissant sur L’Utopie, la plupart des commentateurs y ont vu le retour à un monde maternel caractérisé par l’absence de père. Ainsi Jean Servier dans son livre L’Utopie écrit : “Le communisme utopien tend à écarter l’image du père en la remplaçant par la cité maternelle pourvoyeuse, seule capable de satisfaire tous les besoins”. L’Utopie serait alors un retour à Big Mother pour reprendre le titre du livre de Michel Schneider et signifierait ainsi, l’effort de la culture pour surmonter le traumatisme de la naissance et exprimerait selon le mot de Ferenczi “le désir de régression thalassale et de retour à l’océan abandonné dans les temps anciens”. Elle serait le retour à la Mère Primordiale, matrice de toutes les régénérations et de toutes les renaissances. Nombreux sont d’ailleurs, les termes qui fondent cette interprétation matricielle de l’Utopie et tout particulièrement le thème de l’île et de l’eau. »[Extrait de l’article]


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PSYCHANALYSE N° 7

La clinique psychanalytique contemporaine

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septembre 2006

THÉORIE

La sexion clinique. Érik Porge

Une pratique de bavardage.Talking cure. Par ces mots Bertha Pappenheim, alias Anna O., désigna dans les Évs 1880 cette nouvelle méthode de traitement, initiée par J. Breuer et qui allait prendre grâce à Freud le nom de psychanalyse. Quelque cent ans plus tard, en 1977, nous entendons Lacan au début de son séminaire Le moment de conclure dire que la psychanalyse est une “pratique de bavardage”. Le rapprochement de ces deux énonciations est d’autant plus saisissant que tant d’événements de tous ordres se sont passés entre-temps.

La simplicité, voire la trivialité, du propos de Lacan, à la fin d’un enseignement si fécond, ne laisse pas de surprendre. C’est de l’écart et du recoupement de ces dires que je pars pour interroger ce qu’il en est de la clinique psychanalytique et de sa transmission

La possibilité d’une psychanalyse ? La solution Houellebecq. Marie-Jean Sauret

La lecture de La possibilité d’une île m’a à la fois retenu et laissé perplexe : retenu parce que l’auteur y analyse avec précision la subjectivité de notre époque et extrapole son destin ; laissé perplexe devant les conséquences qu’en déduit l’auteur sur le lien social présent et à venir. La volonté d’éclairer cette impression complexe est à l’origine de cet article : on n’y trouvera donc pas une critique exhaustive de l’ouvrage.

Le mouvement « queer » : des sexualités mutantes ? Pascale Macary-Garipuy

Si le post-modernisme est un signifiant à manier avec précaution, pour ce qu’il en est du mouvement queer, il s’impose, tant le sujet qu’il met en scène se trouve sans l’appui de l’Autre et orphelin de toute transmission. Le discours de la science, le capitalisme, les systèmes de représentativités démocratiques du Nord promeuvent l’individu au détriment du sujet, qui se trouve emporté vers des terres inconnues quant aux modes de consommation, de sexualité, de rapport à l’autre. Le corps, ses représentations, son usage – y compris dans les transformations qui lui sont imposées – est bien sûr central dans cette mutation puisqu’il est le lieu de la jouissance : deux thématiques à la fois centrales et problématiques des théories queers.

Le mouvement queer, mouvement parce qu’il s’enracine, en ses formes savantes, dans la littérature et sa critique, l’esthétique, la philosophie, la sociologie, l’anthropologie, l’histoire, se situe dans cette translation qui va d’une modernité dépassée vers des lendemains vertigineux. Le mouvement, la translation, la mutation sont des signifiants utilisés abondamment par les théoriciennes du queer, pour parler des sujets “queerisés”, faisant du même geste de ces sujets les incarnations paradigmatiques de ce monde sans garantie d’aucun Autre.

Du délire dans les Bacchantes d’Euripide. Geneviève Morel

Du délire dans Les Bacchantes d’Euripide .Rappelons-le en ces temps contemporains où les religions, dit-on, marquent des points : pour Freud, la religion est apparentée au délire. Certes, il amène cette thèse à propos du monothéisme, et il la tempère en remarquant que tout délire, même psychotique, a un noyau de vérité. Cependant, son affirmation, dont il faut rappeler la force, concerne en fait le caractère délirant de toute croyance religieuse, en tant que la conviction qu’elle recèle nécessairement plonge ses racines dans l’infantile. Elle s’étend aussi de ce fait – mais c’est un tout autre problème -, à la conviction obtenue à partir des constructions dans l’analyse.

La radicalité de cette affirmation freudienne revient en mémoire lorsqu’on lit Les Bacchantes d’Euripide […]

Lettre à Geneviève Morel. Jean Bollack

La non-reconnaissance par Penthée est essentielle à la pièce. Ce n’est pas une faute qui explique un “châtiment”. Il meurt pour la gloire de Dionysos.

Le double : dramatiquement, le dieu se travestit pour pénétrer en homme dans le domaine humain. Il n’est pas un double divin. Il se dédouble dramatiquement, comme le lui permettent ses ressources illimitées. 

L’ASSOCIATION

La psychanalyse au Japon. Entretien avec Kosuke Tsuiki

Psychanalyse : Quand et comment l’œuvre de Freud a-t-elle été introduite au Japon ?

Kosuke Tsuiki : Avant de répondre à vos questions, je vous remercie d’abord pour m’avoir fourni cette occasion, je dirais ravissante, de faire une contribution à votre revue toujours savoureuse. Roland Barthes distingue quelque part deux types de question. Question tragique : que suis-je ? Question comique : suis-je ?…

LA PASSE

L’expérience de la passe. Pierre Bruno

Il y a la cure. On s’imagine savoir ce que c’est. Quelqu’un est allongé. Quelqu’un est assis derrière. Je considère qu’une psychanalyse a commencé quand Freud a renoncé à imposer ses mains sur la tête du patient ou de la patiente pour l’aider à se souvenir. “Imposer”, voilà le mot-clé. La psychanalyse renonce à imposer. C’est pourquoi j’ai choisi comme exergue ce vers de François Villon : “Puissant je suis sans force et sans pouvoir.” La seule qualité qu’on puisse exiger d’un(e) psychanalyste est qu’il consente à être réduit, à la fin de la cure, à “un signifiant quelconque” après avoir été, à son début, sorti de l’anonymat et élu comme nom propre. Untergang (déclin, chute, disparition) du psychanalyste comme réalisation d’une psychanalyse.

Il y a la passe. La passe de Freud est d’avoir banni l’imposition des mains sur la tête du patient, qu’on appelle aussi “passe” dans ma langue et qui est le contraire de la passe inventée par Lacan en 1967. Celle-ci est une expérience, distincte de la cure. Sa condition : celui ou celle qui s’y engage doit être analysant(e) ; la passe n’a de sens qu’à questionner l’expérience de la cure. La passe est un dérangement (au sens où on parle de perturbation d’une ligne téléphonique ou d’interruption d’une tâche en cours) de la cure.

La cheville ouvrière de la passe. Fabienne Guillen

Au moment de me mettre au pied du mur d’essayer de dire quelque chose de cette expérience de passeur que je viens de vivre pendant à peu près trois ans à l’APJL, c’est spontanément cette expression qui m’est venue en tête. Petite pièce située entre le passant et le cartel de la passe, je n’ai pas trouvé d’autre expression pour faire résonner le sentiment de responsabilité, le caractère laborieux de cette tâche en double aveugle, la solitude et le vide que rencontre le passeur dans sa fonction dus à l’absence de toute référence théorique et identificatoire. J’ai été amenée par le sort à écouter cinq passes et à devoir en témoigner devant le cartel de la passe. J’avais pourtant en 1992 participé au dispositif de la passe au sein de l’ECF en tant que passante, mais, malgré l’importance cruciale et inoubliable que cette expérience avait eu dans mon parcours analytique, cela ne m’avait pas permis de saisir comme j’ai pu le faire dans cette récente replongée dans ce dispositif complexe le caractère singulier de cette invention de Lacan pour tenter de nouer intention et extension, c’est-à-dire faire passer de l’individuel au collectif ce savoir acquis d’une psychanalyse, savoir dont Lacan soulignait lui-même qu’on ne peut pas s’entretenir. Il me semble que le tour de force qu’a opéré Lacan dans cette invention est d’avoir conservé dans ce passage au collectif l’essence même qui fait le nerf de la psychanalyse d’être une expérience de parole qui, venant forcément chatouiller la vérité, permet toujours quelque subversion du savoir déjà là et laisse ses chances aux surprises. Le travail du passeur se scande en trois moments :

–l’écoute du passant ;

–la construction du témoignage ;

–la transmission de ce témoignage au cartel de la passe.

Clinique de la passe. Elisabeth Rigal

Pourquoi un tel titre ? La passe porte l’inscription de moments douloureux pour les mouvements psychanalytiques. La réflexion de Lacan “c’est un échec” et les crises répétées peuvent induire que nous sommes au chevet d’une grande malade. Point de butée pour la psychanalyse ?

Je vais vous proposer deux postulats que je vais essayer d’articuler de façon clinique en liaison avec ma cure, l’expérience de la passe et du cartel de la passe.

Une clinique de la passe pourrait être une tentative de dégagement de l’échec, du risque d’échec. Avec un point de visée : une politique de la passe pour se dégager d’une passe politique dont nous savons les désastres. C’est me semble-t-il une condition pour qu’un savoir puisse s’élaborer à partir des passes. Savoir qui relèverait alors plus de l’invention que du dogme, du discours analytique plus que de l’universitaire. Tentative à renouveler encore et encore.

Le second postulat est de mettre au centre de la réflexion une question : qu’est ce qui fait décision pour l’analysant, les passeurs, le cartel de la passe ? Poser cette question également côté passeur peut paraître incongru, mais elle se fonde sur le fait qu’une passe n’est pas portée de la même façon par les deux passeurs : un, fait que ça passe, passe avec, pas les deux : c’est un fait d’expérience, mais est-ce une loi ? Je ne sais pas. De toutes façons, c’est une question de rencontre (ça s’est passé) et d’entrée ou pas dans le discours analytique à partir de cette passe-là.

INÉDIT

Note au lecteur.

En 1957, à Paris comme correspondant d’un journal colombien, Gabriel Garcia Marquez écrivit Pas de lettre pour le colonel. La situation de violence que le pays vivait à cette époque détermina la suspension temporaire du journal. L’écrivain attendait avec impatience, jour après jour, l’envoi de son salaire. Cette situation et celle de son grand-père, un vieux militaire qui avait participé aux guerres… 

Lettre au Colonel à qui personne n’écrit. Entre le journal et les comptes de l’Autre. Mario Bernardo Figeroa Muñoz

Bogota, le 5 novembre 1999

Cher colonel :

M’adresser à vous est sûrement une audace de ma part. Je me suis arrogé ce droit parce que j’ai fini par admettre, qu’au bout de ce temps long, si long que ce “… pas de lettre” est presque devenu votre nom. Mais, ne trouvant pas d’autre façon de donner libre cours aux inquiétudes qui m’envahissent au sujet des difficultés que traverse notre société colombienne et ma tentative de découvrir quelques lumières dans la littérature, dans les lettres colombiennes je me vois contraint de vous écrire cette lettre.

Là, mon colonel, votre histoire occupe une place importante, étrange de surcroît, car la façon dont vous y avez pris place fut celle d’une absence… celle de l’écrit qui manque, qui n’arrive pas, celle de l’attente infinie qui empêcha, l’un de ces innombrables vendredis, l’arrivée dans votre village de la correspondance si désirée. 

FREUD

Visite à Freud. Robert de Traz

Notre éminent correspondant et collaborateur, M. Robert de Traz, directeur de la Revue de Genève, a bien voulu nous envoyer le récit de la visite qu’il vient de faire au professeur Freud, à Vienne, et dont nous n’avons pas besoin de souligner tout l’intérêt.

Le professeur Sigismond Freud habite, à Vienne, au bout d’une rue en pente, dans un appartement simple d’aspect, où il vous reçoit rapidement, entre deux consultations. Le plus simple, pour bien l’interroger, serait de prétexter une névrose : en faisant “psychanalyser”, à l’instar des Anglais et des Américains, qui y recourent en masse, on apprendrait beaucoup de choses sur le freudisme. Mais trop honnête pour simuler un trouble que je n’aurais d’ailleurs pas avoué, j’eus avec lui un entretien court et gai.

Car cet homme qu’on imaginerait, d’après certains de ses commentateurs, bizarre et prophétique, témoigne au contraire d’une charmante bonhomie.


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PSYCHANALYSE N°6

Psychose et perversion

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mai 2006

THÉORIE

Le transfert érotomaniaque. Dimitris Sakellariou 

De plus en plus de sujets psychotiques fréquentent les psychanalystes. C’est un fait notable par les temps qui courent, alors que la psychanalyse est publiquement mise en cause par tout un courant positiviste hétéroclite, qui, au nom de la science et des méthodes statistiques d’évaluation, remet en cause la validité scientifique et l’efficacité du dispositif freudien de la cure psychanalytique. Des…

Wilson, le surmoi. Michel Lapeyre 

Pour la énième fois, j’ai relu Le président Wilson, de Freud et Bullitt. Le président Wilson (la personne et l’ouvrage du même nom) est une chose, une affaire, curieuse et bizarre. D’une part donc le personnage, qui semble jouir d’une réputation sinon d’une renommée plutôt flatteuse, parfois élogieuse, du moins à en croire certains avis autorisés, du journaliste à l’historien et au politologue : un…

La passe. Lien et détachement. Patricia León-Lopez 

Avec l’expérience de la passe, Lacan cherche à subvertir l’institution en ouvrant un horizon nouveau pour la psychanalyse. Un autre repérage pour rendre compte du désir de l’analyste, de ce passage de l’analysant à l’analyste s’introduit et sans doute produit des effets, au point qu’aujourd’hui il y a tout un débat autour du statut donné à la passe, avec les questions qu’elle soulève. Le recrutement…

La (dé)mission perverse. Pierre Bruno 

D’un article précédent, dont celui-ci peut passer pour la suite, je retiendrai une assertion : la perversion vise une jouissance sans libido, et une question : quel(le) partenaire veut le pervers ? Pour l’assertion, sans chercher ici à répéter ce qui, à mes yeux, la fonde, il me semble pouvoir en confirmer la justesse en faisant état du fait que la perversion est incompréhensible, strictement, au névrosé,…

L’ASSOCIATION

Entretien : Questions à “ l’Articulation ”

Lors du symposium national « Psychanalyse et psychothérapie dans le champ de la santé mentale » qui s’est tenu à Rio du 31 août au 3 septembre 2005, sont intervenus plusieurs membres de l’« Articulation des associations de psychanalyse du Brésil ». L’Articulação das Entidades Psicanalíticas Brasileiras est une initiative qui réunit des analystes d’associations différentes (et qui n’en sont pas les…

LA PASSE

Une mémoire en cadeau. Laure Thibaudeau

La passe, en tant que moment, est une nécessité du processus analytique. Encore le sujet doit-il y consentir. Parce qu’il peut décider de rester du côté de son aliénation à l’Autre. Cela bien sûr ne sera pas sans conséquences pour son analyse. Quand on demande à entrer dans la procédure de la passe, il me semble que c’est aussi en réponse à une nécessité. Mais, pour autant, cette nécessité ne fait pas…

Entre dedans et dehors. Martine Noël

Je viens d’être nommée analyste de l’École. Cela m’a surprise et émue. Qu’un point de vide soit reconnu comme essentiel est tellement à l’opposé des reconnaissances sociales, universitaires habituelles. Cette nomination n’a pas changé ma vie, ma relation avec les autres ; alors que la passe oui. En revanche, elle a permis que je sois là, devant vous, ce qui n’est pas rien. Je vais donc essayer de vous…

Il court, il court le furet. Marie Martin

Je viens d’être nommée analyste de l’École. Cela m’a surprise et émue. Qu’un point de vide soit reconnu comme essentiel est tellement à l’opposé des reconnaissances sociales, universitaires habituelles. Cette nomination n’a pas changé ma vie, ma relation avec les autres ; alors que la passe oui. En revanche, elle a permis que je sois là, devant vous, ce qui n’est pas rien. Je vais donc essayer de vous…

MICHEL HERRERIA .“ CARTES A GRATTER ”
L’ESSAI

Freud et Wittgenstein. Brian McGuinness

Les remarques de Wittgenstein sur Freud ne constituent pas une critique raisonnée ou systématique de la psychanalyse. Leur origine suffit à expliquer cela. Elles apparaissent au cours de notes prises par Rhees lors d’entretiens, ou bien sont dispersées au fil des propres carnets de Wittgenstein à des endroits où il parle de quelque sujet général – comme le symbolisme, le mythe ou la science – ayant…


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PSYCHANALYSE N° 5

La perversion

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janvier 2006

THÉORIE

L’arrangement (sur la perversion). Pierre Bruno

Dans le champ du savoir psychanalytique orienté par Freud et Lacan, l’existence d’une « forme qui assujettit » (J. Lacan, 1967, dans Autres écrits, Paris, Le Seuil, 2001, p. 366) spécifique de la perversion, distincte donc de la névrose et de la psychose, est une thèse qui n’a jamais été mise en cause. Il faut prendre la mesure de l’écart existant entre cette conception et celle vulgarisée à la fin…

Le mensonge et le mal. Diana Rabinovich

Lacan a fait une lecture non imaginaire du mal. Une lecture formelle, symbolique et réelle du mal, ce qui l’a conduit à accentuer la dimension de satisfaction du sujet qu’il a appelé jouissance, celle à qui le mal est intrinsèquement lié. Cette lecture est inséparable d’une nouvelle économie que Lacan a proposée, articulée avec le désir de l’Autre, cet Autre qui méconnaît que le sujet est un être désirant…

Eugénie Lemoine-Luccioni. Claire Harmand 

Psychanalyste, élève de Jacques Lacan, membre de l’École de la cause freudienne, auteur de nombreux livres, Eugénie Lemoine-Luccioni s’est éteinte le 22 juillet à l’âge de 92 ans.La psychanalyse, nous disait-elle, c’est la rencontre analytique, c’est un « travail d’amour » avec un analyste qui a le solide désir de mener la cure à son terme. Voilà ce qui fondait avec vivacité sa pratique analytique,… 

L’ASSOCIATION

L’entretien. Roland Gori 

Psychanalyse : Nous connaissons vos engagements universitaires en faveur de la psychanalyse, moins les étapes décisives de votre parcours personnel en relation aux associations de psychanalyse. Roland Gori : Mes engagements personnels m’inscrivent d’une manière sans doute singulière dans le champ des institutions analytiques. Mais peut-il en être autrement dans un parcours analytique ? J’ai commencé…

LE CAS

L’anorexie mentale : symptôme ou acting-out ? Fabienne Guillen

Si quelqu’un peut nous donner l’idée de ce qu’est l’embarras du corps chez l’être affligé de la parole, c’est bien l’anorexique qui pousse cet embarras, forme légère de l’angoisse, nous dit Lacan dans son séminaire X, jusqu’à la limite la plus insoutenable, l’évocation comme par transparence du cadavre dans son propre corps. Ce procès décidé de néantisation de sa chair auquel elle se livre sous le…

L’ESSAI

Découpages du Tractatus. Sylviane Agacinski

Traitant du langage (et) de la représentation, le Tractatus ne souscrit pas au départ philosophique. Il s’ouvre sur un autre partage. Le langage ici, tout langage – et non tel ou tel système de signes – est dit fonctionner comme représentation. Par exemple : « Toute proposition est une image (Bild). » C’est ce qu’on a appelé la picture theory ou, en français, la théorie du « langage-tableau ». Comme…

LA PASSE

Passe et nomination

Le « mystère » de la cure tient à la gravitation transférentielle. La fin, en principe, le dissipe, une fois que l’analysant à traversé la dépression induite par la rencontre avec la contingence dudit transfert. C’est ce moment que Lacan a formalisé sous le nom de passe et dont il a inventé la procédure – qui permet son authentification. Il serait donc incongru, puisque la passe est un recours au…

Correspondance

La correspondance entre les deux poètes russes Marina Tsvetaeva et Boris Pasternak était connue jusqu’à présent de manière partielle et fragmentaire grâce au livre paru aux éditions Gallimard en 1983 : Rilke, Pasternak, Tsvetaeva, Correspondance à trois (été 1926) et aux Quinze lettres à Boris Pasternak, parues aux éditions Clémence Hiver en 1991.Or les éditions des Syrtes viennent de publier la traduction…


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PSYCHANALYSE N° 4

La loi, le symptôme, la passe

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septembre 2005

 THÉORIE

La traversée de la loi. Isabelle Morin

La loi ne traite pas le réel parce que « le réel n’a pas de loi ». Que le réel soit sans loi, c’est ce qu’avance Lacan dans son séminaire Le sinthome, consacré à Joyce et au nouage que ce dernier a inventé pour stabiliser la structure borroméenne en l’absence du Nom-du-Père. C’est à travers le non-rapport du réel à la loi que je compte examiner comment le sujet s’y inscrit et s’en débrouille jusqu’au…

Le oui de/du départ. Patricia León

Il n’y a aucune garantie que le oui de départ, le oui par lequel on s’est décidé à entrer dans l’expérience analytique, puisse être retrouvé à la fin. Je dis bien « retrouvé », ce qui implique que, dans la trajectoire de la cure, ces deux oui, celui du commencement et celui de la fin, deviennent étrangers l’un à l’autre, creusent un écart, sans que pour autant, au-delà de la frontière qui les sépare,…

La révolution du symptôme. Sidi Askofaré

À suivre le mouvement de l’enseignement de Lacan, on ne peut manquer de se heurter à un paradoxe au moins apparent : les concepts qu’il considéra après Freud – et d’ailleurs par un sévère coup de rasoir d’Occam – comme les plus fondamentaux de la psychanalyse ne se retrouvent guère ou alors fortement réduits et dévalués avec la mise en place et la dominance du « paradigme » borroméen. Ainsi observe-t-on…

Dedans-dehors. María Antonieta Izaguirre

Même si l’on ne peut connaître, une fois l’analyse commencée, la manière dont un sujet s’incorporera au lien social, le parcours d’une analyse, et plus encore le travail de la passe, la mettent en lumière, éclairent cette caractéristique de soi-même qu’est la position subjective ; à partir de ce moment-là, c’est le fruit d’une décision propre. La position subjective, présente auparavant, mais que l’on…

L’ASSOCIATION

L’association. René Major

René Major a accepté de répondre aux questions, posées par écrit, de Psychanalyse. Nous l’en remercions vivement. Cet entretien s’inscrit dans l’enquête conduite sur l’association psychanalytique. Psychanalyse : Pouvez-vous d’abord nous retracer les étapes décisives de votre parcours personnel concernant votre relation aux associations de psychanalyse ? René Major : Permettez-moi de dire d’abord…

LE CAS

La défense dans la paranoïa. Michel Mesclier

Je vais évoquer ici un enfant, un petit garçon que l’équipe du CMPP où je travaille me confia pour une psychothérapie. Je vais le nommer Alexandre, car, dans les moments où je résiste à son impérieuse autorité, à ses ordres sans appel, il affirme avec la certitude des grands hommes : « Je suis grand maintenant, j’ai 5 ans et demi et je suis le plus fort du monde. » Ce n’est pas une plaisanterie, car… 

L’ESSAI

Le privé, l’intérieur et l’extérieur. Sandra Laugier

Le statut du privé chez Wittgenstein est plus complexe que ne le donnent à penser un certain nombre d’interprétations classiques de son œuvre. On pourrait inscrire, à première vue, une certaine continuité dans l’œuvre de Wittgenstein par la dénonciation du mythe du secret ou du privé : pour reprendre l’expression de son disciple Norman Malcolm, Nothing is hidden – « rien n’est caché ». Cette continuité…

LA PASSE

La passe de A.

Elle est partie de la maison familiale il y a seize ans, en 1989, après ses études de psychologie. Elle est partie avec les textes de Freud et de Lacan, comme elle dit, afin de s’inscrire en dea à Paris. Elle était alors en proie à un symptôme phobique massif qui l’a conduite en analyse. Elle a fait deux tranches d’analyse, la première avec un homme, qui a duré six ans, la deuxième avec une femme, qui…

La passe de B.

« Pourquoi la passe ? Plusieurs raisons à cela. Si je suis lacanienne, je me dois donc de faire la passe. J’ai terminé mon analyse, mais dire que j’ai terminé est difficile du fait de la caractéristique de fin de mon analyse. Ce n’est pas la nomination qui m’intéresse, et aux Forums, il fallait attendre, c’était compliqué, j’ai voulu ne plus attendre, l’essentiel était de la faire, ce n’était pas compliqué…

L’INTROUVABLE

La frigidité chez les femmes. Hélène Deutsch

En ajoutant quelques remarques à cette discussion, j’abuse des privilèges du président qui est supposé être un organisateur et non un participant. Après avoir publié les deux volumes de The Psychology of Women (1944-1945), j’ai senti que j’avais épuisé mes connaissances sur le sujet. J’avais mis dans ces volumes vingt-cinq années d’expérience analytique et j’étais disposée à ne jamais revenir sur le…

L’INÉDIT

Vieux fer. Onelio Jorge Cardoso. Présentation de Santiago Mutis

Il existe un vieux préjugé universitaire, répandu dans l’opinion publique, qui consiste à considérer tout ce qui est relatif à la campagne comme un déplorable retard, inventant ainsi un nouvel arpent – pathétiquement court – pour mesurer l’homme : le progrès (entendez par là automobiles, autoroutes, barrages, moyens de communication, technologie, centres commerciaux, etc.), c’est-à-dire tout ce qui…


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PSYCHANALYSE N° 3

Incroyance et psychose

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mai 2005

THÉORIE

Au-delà de la logique divine .Nicolas Guérin

Le problème de savoir si la psychanalyse est capable de promouvoir un authentique athéisme n’est certes pas vraiment neuf. Freud, le premier, a toujours revendiqué son athéisme dans la mesure où il était presque tenu par lui comme la condition indispensable à son effort pour situer la psychanalyse dans le débat des Lumières et hors des illusions vaines de toute Weltanschauung religieuse.Lacan, à sa…

« Poète ou névropathe » ? Anne Le Bihan

Il y a chez Freud, nous semble-t-il, deux thèses distinctes sur ce qui définit respectivement la position du névrosé et la position de l’artiste ou du créateur.La première thèse réfère la création artistique et la névrose à la notion de sublimation et au concept de refoulement. Cette approche de la question de la création artistique n’évite pas un hiatus entre la construction théorique et l’expérience,…

Du bain de Diane à Artémis l’ensauvagée. Pascale Macary

Faisant référence à ce discours du maître qu’est la science, Lacan soulignait que le rejet de la dynamique de la vérité – comme cause – servait à refouler « ce qui habite le savoir mythique. Mais, excluant celui-ci du même coup, elle n’en connaît plus rien que sous la forme de ce que nous retrouvons sous les espèces de l’inconscient, c’est-à-dire comme épave de ce savoir, sous la forme d’un savoir…

La raison psychotique. Pierre Bruno        

L’objet de cet article est de reprendre l’examen de la psychose, c’est-à-dire d’une des trois formes, avec la névrose et la perversion, « qui assujettit ». Assujettir n’est pas subjectiver, verbe dont la sémantique indiquerait plutôt le chemin qu’un sujet doit faire pour se libérer, par le symptôme, de l’immuabilité du fantasme (et non de se libérer du symptôme par un fantasme… thérapeutique). Assujettir…

L’objection. Marie-Claire Terrier et Michel Lapeyre

Dans son article « Les hommes aux loups » paru dans psychanalyse n° 2, Marie-Jean Sauret pose comme possible une forclusion de la castration sans forclusion du Nom-du-Père, ce qui lui permet de soutenir que l’on a affaire dans le cas de l’Homme aux loups à une névrose obsessionnelle. Mes questions sont les suivantes : comment dans ce cas un sujet peut-il construire un fantasme névrotique qui prendra…

EXTÉRIEURS 

Les Olympiades 1936. Lacan, Berlin et la passion de l’ignorance Claus-Dieter Rath 

À l’occasion d’un grand congrès parisien en janvier 1991, quand bon nombre de ceux qui s’étaient organisés en divers groupes après la dissolution de l’École freudienne de Paris (1980) et la mort de Jacques Lacan (1981) se retrouvèrent pour la première fois (en tant qu’Inter-associatif de psychanalyse), des rapports sur le travail psychanalytique dans les pays européens, en Amérique du Nord et du Sud…

La Grande Paix. Volker Braun. (Présentation d’Alain Lance) 

La pièce Grosser Frieden (« La Grande Paix ») se situe à une époque charnière dans l’œuvre de Volker Braun (né en 1939 à Dresde). Il l’écrit en 1976, année qui s’achève sur un grave conflit opposant au pouvoir de nombreux écrivains de la rda, parmi lesquels Volker Braun lui-même. Avec Stephan Hermlin, Heiner Müller, Sarah Kirsch, Christa Wolf et quelques autres, il avait signé une pétition de protestation…


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PSYCHANALYSE N° 2

Les déclinaisons de la névrose

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janvier 2005

THÉORIE

Vivant et féminin dans le parcours phobique. Isabelle Morin 

Pour entrer directement dans le vif de la phobie, j’évoquerai une petite histoire pleine d’humour dont se sert Jacques Lacan pour illustrer ce que la tradition hindoue enseigne du dhavni, cette modalité de la parole qui fait entendre ce qu’elle ne dit pas. Une jeune fille qui attend son amant sur le bord d’une rivière voit arriver un brahme qui s’engage dans le même chemin. Elle s’écrie alors d’un…

Ça ne fait pas névrose. Jacques Marblé 

Ma place institutionnelle m’ayant conduit à militer pour une reconnaissance du fait traumatique, à une époque où il y en avait bien besoin, je me vois fort navré depuis quelque temps de constater les ravages du retour de balancier que constitue l’inflation du trauma dans le discours ambiant. Et c’est ainsi que, après avoir défendu la cause de la névrose traumatique, je vous propose ce titre : « Ça…

Les hommes aux loups. Marie-Jean Sauret 

Alors que je me débattais avec les diagnostics de l’Homme aux loups, je me réveillai un matin avec la réflexion suivante : malgré les indices de névrose recueillis de ma propre analyse, les amis (et les moins amis) qui épinglent ma folie ont peut-être raison. Au fond, ce à quoi je suis le plus attaché est non pas le fait de savoir si je suis de telle structure, névrotique ou psychotique, mais ce que…

« Elle ne savait pas me voir ». Genèse d’un désir de mourir. Geneviève Morel 

J’ai reçu madame X, âgée de 41 ans, lors d’un unique entretien pour une présentation clinique à l’hôpital. Elle y était pour une énième tentative de suicide : depuis quelque temps, elle s’injecte régulièrement de l’air dans les veines, suicide qui ne laisserait pas de traces visibles, selon elle. En effet, l’une de ses préoccupations est de ne pas effrayer son entourage et surtout ses enfants qui découvriraient… 

Pouvoir et fantasme sadomasochiste. Francesco Perena

Affecté d’un état fébrile et délirant pendant son bagne sibérien, Raskoslnikov rêve : « Le monde entier était condamné à un fléau terrible et inconnu venu du plus profond de l’Asie, qui avançait sur l’Europe. Tout le monde devait périr à l’exception d’un très petit nombre d’élus. Il s’agissait de quelques nouvelles trichines, êtres microscopiques qui se logeaient dans le corps humain. Mais ces parasites… 

L’ASSOCIATION

L’association. Michel Plon, Érik Porge

Avec ce deuxième entretien, psychanalyse est presque au seuil d’une série. L’objet de celle-ci est de questionner les psychanalystes – qui y consentent – sur la relation, de cause à effet ou d’effet à cause, entre la direction et la finalité d’une psychanalyse et le mode de lien entre psychanalystes. Psychanalyse : Érik Porge, vous êtes membre d’une association ; vous, Michel Plon, non. Pouvez-vous…

INÉDIT 

Deuil, nécrophilie et sadisme. Marie Bonaparte 

Les étranges créations d’Edgar Poe avaient attiré, dès leur parution, l’attention des littérateurs et du public. Je dis l’attention, non pas la sympathie. Malgré le goût ambiant d’alors pour les spectres et les châteaux branlants, pour Hoffmann ou Anne Radcliffe, il y avait quelque chose, dans l’œuvre de Poe, qui, tout en le frappant, repoussait le public, surtout le public, encore si puritain, d’Amérique….  

POÈME 

The Diagram Poems. Douglas Oliver 

Douglas Oliver est né en 1937 de parents écossais. Son père travaillait dans une société d’assurance et sa mère était femme au foyer. Oliver passa son enfance à Bournemouth, en Angleterre, en se consacrant à l’observation des oiseaux et en écoutant du jazz, surtout chanté par Bessie Smith. Médiocre étudiant, sa vie professionnelle commença à l’âge de 16 ans. Il travailla dans un bureau et devint par…


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PSYCHANALYSE N° 1

Changement de psychanalyse

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septembre 2004

THÉORIE

Changement de psychanalyse. Pierre Bruno

Ce titre est un pléonasme, pour autant qu’une psychanalyse, dès qu’amorcée, change la psychanalyse. Le problème est donc plutôt de savoir pourquoi, en dépit de cette assertion qui probablement ne rencontrerait pas d’objection, la psychanalyse, en tant que doctrine, secrète tendanciellement sa propre idéologie. Par idéologie, j’entends deux choses : a) la promotion d’une clinique spéculaire, dans laquelle…

Le mensonge. Patricia Leòn-Lopez

Ce fut seulement dans un après-coup que l’actualité de la question sur le mensonge au cœur de débats politiques de notre complexe et effrayante actualité m’a saisie. Quand la question m’est apparue, je me suis mise à réfléchir sur la possibilité de la psychanalyse à produire des faits nouveaux, à révéler pour chaque homme qui s’engage dans l’expérience un autre ordre, un champ pour lui méconnu, imprévisible,…

Attention bonheur ! Gérard Pommier 

« Bonheur » désigne-t-il seulement la grâce des imbéciles ou bien s’agit-il d’un mot bizarre, qui ne nomme en réalité aucune chose, ni aucun état, et sert seulement à donner du relief à ce qu’il n’est pas, c’est-à-dire à la cruauté du présent ? Pourtant, il y a des témoins : le bonheur existe. Mais sa nature et ses conditions restent problématiques. Ces questions furent d’abord discutées par les théologiens,… 

« Tu peux ! »Sur le surmoi postmoderne. Slavoj Zizek

Les « rule girls » sont des femmes qui s’imposent des règles strictes sur la façon dont elles peuvent se laisser séduire : par exemple, accepter un rendez-vous galant à la seule condition qu’il ait été demandé au moins trois jours à l’avance. Bien que ces règles soient inspirées des anciennes coutumes qui dictaient leurs comportements aux femmes bien élevées quand elles étaient activement courtisées…

L’ASSOCIATION

L’association. Pierre Bruno, Isabelle Morin, Marie-Jean Sauret

Psychanalyse : Vous avez refusé d’entrer dans l’École de psychanalyse du champ lacanien, qui était l’École des forums. Pourquoi, puisque vous aviez participé activement et au départ de l’École de la Cause freudienne et à la construction des Forums ? Vous avez d’autre part créé une association qui s’appelle l’Association de psychanalyse Jacques Lacan. Qu’est-ce qui vous a conduits à cette décision ? Isabelle… 

LE CAS

Calamity Jane, ou l’amour au-delà de l’objet. Isabelle Morin

Freud écrit, en 1915, un court article à propos d’un cas de paranoïa féminine et lui donne pour titre : « Communication d’un cas de paranoïa en contradiction avec la théorie psychanalytique ». Le cas clinique est le socle de la théorie, et non l’inverse, et si un seul cas invalide la théorie, c’est alors la théorie qu’il s’agit de repenser. Freud, par cette position rigoureuse, fondait la primauté…

EXTÉRIEURS

Nous qui gardons le mystère serons les seuls à être malheureux. Tony Kushner 

Trois enfants en pyjama et en robe de chambre s’assoient sur des petites chaises bien alignées. Derrière eux, un ange se tient debout. En face d’eux, un grand fauteuil, peu confortable et inoccupé. Une belle lumière. L’ange est et reste immanquablement gentil et poli tout le long de la pièce. L’ange. – Mes chers enfants, levez-vous et faites un accueil chaleureux à notre distinguée invitée, la Première…


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